ou comment une première expérience professionnelle (ou presque) se transforme en volontariat international à l'Ambassade de France au Pakistan !!

mercredi 30 décembre 2009

Mercredi 30 décembre 2009 : opération "Malles"

Petit rappel histoire de rattacher tous les wagons - Je suis parti de France en envoyant au préalable 104kg d'affaires personnelles en fret. Ces quelques kilos étaient répartis dans deux malles métalliques qui ont quitté mon domicile breton le jeudi 3 décembre. L'agence en charge de ce transit m'avait précisé un délai d'environ 3 semaines... pourquoi pas !
Quelle ne fut pas ma surprise en apprenant jeudi dernier (24 décembre) que mes chères malles étaient arrivées à Islamabad le matin même ! Le délai a été respecté : "Sortez le champagne !" Mais en fait, c'est à ce moment que les choses intéressantes ont commencé.
Le calendrier combiné entre français et pakistanais donnait un week-end de 4 jours (Noël le vendredi et une fête chiite le lundi) et retardait d'autant la mise en route des démarches administratives avec les douanes. Le mardi, lendemain de férié, fut un jour de reprise laborieuse avec des effectifs minimum dans les agences locales. C'est donc mercredi que les choses se sont accélérées.
Ayant un contrat "porte à porte", j'aurais juste du être présent à mon appartement pour réceptionner les colis, mais au Pakistan ce n'est pas si simple. Ma présence était requise aux douanes avec mon plus beau sourire et mon passeport pour être sur que tout se déroule correctement. Je suis donc accompagné par un employé de l'agence locale jusqu'à l'aéroport dans un taxi (Suzuki Meran) qui fait plus de bruit à l'arrêt qu'en déplacement, et qui n'aime pas les virages à en écouter les gémissements fréquents !
Ce trajet me permet quand même de sortir de l'enclave et de découvrir un peu les alentours d'Islamabad malheureusement sans mon appareil photo (vous devrez patienter encore un peu).
Nous arrivons dans le secteur fret de l'aéroport où nous sommes pris en charge par un homme dont je n'ai pas compris le rôle et encore moins pour qui il pouvait travailler. Quoiqu'il en soit, nous sommes emmenés dans un premier bureau, puis un second ou les papiers sont signés par quatre hommes tranquillement assis sur des chaises devant un cinquième au téléphone derrière son bureau... je me demande ce que je fais là ! Nouvelle attente dans le hall général puis changement de terminal, la compagnie qui a géré le transport a ses locaux quelques dizaines de mètres plus loin. Nouvelle escorte pour ce transit par un homme moins aimable que le précédent, discussion avec l'agent de la compagnie de frêt et sortie de mes malles de la zone de stockage !
Première désillusion : n'étant pas diplomate ou assimilé, les agents des douanes doivent vérifier le contenu des malles : "ah bon ? mais je n'ai pas les clés"... ce n'est pas le genre de chose qui pourrait les arrêter. Quelques minutes plus tard, les 4 cadenas sont en morceaux et deux agents commencent à fouiller dans mes affaires bien rangées pour optimiser l'espace. Résultat des courses, aucun problème particulier, juste besoin de racheter des cadenas parce qu'il est 13h et que c'est la pause déjeuner et prière jusqu'à 14h et que nous ne pouvons pas rester surveiller les malles... Cette pause me fait découvrir les ruelles en terre du quartier voisin de la zone de fret, et le bureau d'un homme que mon "guide" connait. Une heure dans un bureau poussiéreux avec quatre téléphones fixes et trois portables pour un seul homme, un thé noir avec du lait et du sucre (traditionnel), et une discussion entre les deux hommes en urdu... rien compris !
Nous rejoignons les hangars de la compagnie de fret peu après 14h, attendons que les derniers papiers soient vérifiés et signés pour la énième fois, et que le camion pour transporter les malles arrive. Et quel camion !! un petit Mitsubishi avec un plateau à l'arrière et deux places à l'avant. L'état de l'engin laisse à désirer mais apparemment il roule.
Pour couronner ce périple, le retour se fait avec le fameux camion, à trois dans la cabine (le levier de vitesse entre les jambes de celui du milieu, j'étais à gauche), la portière ne ferme qu'en la verrouillant... sécurité quand tu nous tiens ! Le retour se fait donc à peu près sans encombres, juste quelques petites frayeur dans le trafic d'Islamabad mais comme tout le monde roule mal et que le chauffeur ne stresse pas, ça passe !!
La dernière étape est donc l'arrivée dans l'enclave diplomatique.
Pour que vous compreniez bien, cette enclave regroupe la majeure partie des ambassades ainsi que les résidences des ambassadeurs, quelques appartements, quelques clubs et l'école française où je loge. Autant vous dire que c'est la zone la plus sécurisée d'Islamabad avec des check-points à toutes les entrées ainsi que dans l'enclave même.
Nous nous sommes donc heurtés à un refus catégorique de pénétrer dans l'enclave avec le camion et les malles, j'étais le seul à pouvoir rentrer étant agent de l'ambassade. N'ayant pas dit mon dernier mot, nous avons parlementé avec les policiers et fini par appeler le gardien de l'école pour qu'il atteste que je vis bien là-bas et que ce sont mes affaires. Les policiers ont donc fini par nous laisser rentrer et j'ai pu ainsi avoir mes malles à mon appartement.

Cette aventure aura duré 3h30 (entre 12h et 15h30) ce qui est un bon score pour ici. Récupérer ses affaires en moins d'un mois relève de l'exploit !

Si ce récit peut vous donner l'impression que je n'aime pas la vie ici et que ce genre d'aventure m'exaspère au plus au point, j'en suis navré. Ce n'est pas du tout le cas, j'essaie juste de vous dépeindre le tableau comme je le vis et le ressens. C'est juste qu'ici tout est différent et que tout n'est pas simple.

mercredi 23 décembre 2009

Lundi 7 décembre 2009 – 4h15 : une nouvelle aventure commence

Dernière alarme de réveil, dernier réveil très matinal, dernière douche, dernier petit déjeuner, dernier trajet en voiture, dernières embrassades parentales, dernier vol, dernière attente, dernier coup de téléphone, dernier contrôle de sécurité, dernier bonjour, derniers pas. Enfin… en France !!
Je pars, je me délocalise, je change d’univers, de culture, de pays, mais je reste le même : "the same, the same, but different"…
Islamabad - Pakistan : une nouvelle page blanche à écrire, griffonner, raturer, dessiner, gribouiller, croquer.

Il m’aura fallu trois vols via Paris et Bahreïn pour rejoindre Islamabad depuis Rennes. Trois vols pour quatre heures de décalages horaires, neuf heures d’escales, vingt et une heure et quarante cinq minutes de porte à porte, trois repas ou collation, quelques heures de lecture, quelques demi-heures de sommeil. Trois vols pour digérer, appréhender, douter, encaisser, intégrer ce changement d’horizon.
L’arrivée à Bahreïn est déroutante, l’écran indique une température extérieure de 22°C, le pull et encore plus le manteau ne sont plus de rigueur. Je me retrouve en chemise dans un centre commercial des Emirats Arabes Unis, pardon pas un centre commercial mais une zone d’embarquement… la porche et les magasins de matériel hi-fi ou de vêtements m’auraient presque induit en erreur. Quelques voiles ou autre burkas, également quelques coiffes masculines typiques de la zone géographique, quelques blancs aussi. Un premier tour à droite, à gauche pour apprécier l’étendue de cette zone et trouver une extrémité climatisée, peut-être un peu trop. Un petit tour sur Internet grâce à une borne libre service, un peu de lecture et un film pour passer le temps et ne pas m’attendre à ce qui arrive ensuite.
L’embarquement de mon dernier vol est annoncé et je me rends non sans hâte à la porte indiquée pour boucler ce périple. Le contraste est désormais frappant et je ne me demande plus comment identifier des pakistanais, la zone d’attente en est remplie, une importante majorité d’hommes dont beaucoup, habillés de blanc, rentrent de la Mecque. J’aperçois un blanc, en fait c’est mon reflet dans une porte vitrée… mon arrivée ne passe pas inaperçue, je perçois de l’interrogation dans les regards qui me scrutent avec plus ou moins d’insistance. Certains n’hésitent pas à se retourner pour se trouver nez à nez avec moi et sans doute attendre une réaction, qui ne viendra pas. L’embarquement est synonyme de mouvements énergiques de la part de mes voisins qui me pressent pour arriver rapidement dans l’avion. Tant d’agitation me laisse perplexe, j’ai du mal à comprendre. Les réponses viendront plus tard. Je m’installe dans l’avion de la Gulf Air en étant toujours épiés par mes voisins, c’est déroutant mais pas dérangeant.
Le compagnie aura soigné ce dernier vol de la journée : un airbus A330 proche de la retraite, des turbulences dès le décollage et pendant la moitié du vol de 3h30 et une hôtesse des moins rassurées face à ces soubresauts. L’agitation de l’embarquement est décuplée à l’arrivée et certains des passagers quittent leur place en courant pour atteindre la sortie. Il faut ensuite jouer des coudes pour atteindre la navette puis le comptoir des douanes ou le premier tampon est apposé sur mon passeport tout neuf. Je récupère mes bagages et échappe au contrôles par rayon X de ces derniers sans doute grâce à ma couleur de peau.
Je sors de l’aéroport Benazir Bhutto d’Islamabad le mardi 8 décembre à 7h30, heure locale. Ce périple est fini, l’aventure peut commencer.